Jamais content
Et pourtant :
- je mange à ma faim (voire plus) tous les jours ;
- je n’ai jamais soif ;
- il y a des personnes qui sont là quand ça ne va pas ;
- j’ai une maman qui m’aime ;
- j’ai un travail qui me plaît ;
- mon milieu professionnel est agréable ;
- j’ai un logement, qui plus est agréable ;
- j’ai du temps à moi, que je peux occuper à me détendre ;
- il ne se passe pas deux jours sans que je voie des gens bien ;
- en plus des soirées, on me fait des propositions pour socialiser le week-end en journée ;
- je me sens en sécurité ;
- je lis un livre au moins une heure par jour ;
- je peux écrire quand ça me vient…
Et après, au lieu de vivre simplement et content avec un beau « sourire colgate » entre les lèvres, je viens parler d’empathie, de douleur partagée, en faisant référence à tous les points où le monde ne tourne pas aussi bien qu’il ne pourrait ; comme si je cherchais exprès quelque chose qui me rende triste, comme si je ne voyais pas l’hypocrisie de prétendre ressentir la douleur chez les autres alors que je n’ai pas vraiment d’idée moi-même de ce qu’est la souffrance physique, comme si, en fait… je cherchais artificiellement des douleurs sur lesquelles me focaliser pour masquer quelque chose…
Mais masquer quoi ?
Le manque de tendresse ou d’amour ? L’incompétence sociale ? Les troubles relationnels avec la famille ? Le manque d’exotisme dans l’existence ?
J’ai encore du mal à faire le tri.
Ce midi, je suis invité à aller socialiser avec d’autres gens bien autour d’un bon repas (encore un), et je sens d’avance que si je ne me sens pas en confiance, je vais faire mon autiste et broyer du noir. Quelle stupidité. Pourquoi ne pas faire simple and enjoy myself ? Déjà, j’y vais, parce que je sais désormais combien je regretterais ne pas y aller. Mais alors, pourquoi ne pas y aller entièrement, la tête légère, avec comme seule et unique intention d’être agréable envers les gens que je vais voir et d’en ramener un maximum de bons souvenirs ?
Cette nuit, et ce n’est pas la première fois, j’ai fait un rêve. Celui d’avoir quelqu’un(e) derrière moi, quelqu’un envers qui j’éprouverais respect et admiration, qui me tienne dans ses bras en me murmurant à l’oreille : « vas-y, sois toi-même et sois le monde, au moins moi ai confiance en toi. »
L’évidence crève les yeux : je vois très bien qui cela devrait être, et en son absence je passe mon temps déséquilibré entre la recherche d’un substitut et l’instabilité de son absence.