Contrariété

Forte contrariété.

Je crois me rendre compte que les portes du monde s’ouvrent devant moi qu’à la seul condition que je sois faible et docile.

J’ai l’impression que les personnes qui comptent le plus pour moi ne me considèrent comme l’un des leurs que lorsque je suis passif, réceptif, compréhensif, empathique.

Cela, en soi, ne serait pas choquant, si je n’avais pas l’impression complémentaire d’être transparent quand je ne dis rien et que je ne fais rien, et aliéné, rejeté, humilié, dès que je tente de communiquer une idée que je trouve fondamentale et non consensuelle.

Je crois que je découvre l’esprit de groupe. Celui qui aide est aimé, celui qui suit le troupeau est invisible, et celui qui est différent est rejeté.

Je déteste, je hais, j’exècre ce constat qui m’insupporte.

C’est la chose précise qui me rappelle que mon instabilité et mes blessures intérieures me rendent inutiles et dangeureux. À chaque coin d’une conversation banale se cache un détail, une subtilité de langage, qui fait appel à un ressenti passé extrêmement malheureux, et qui renverse ma quiétude si j’y prête trop attention. Je ressens dans chaque fibre de mon corps le manque désespérant de transmetteurs d’émotions efficaces dans le langage. Un medium qui à l’instar des phéromones, serait capable de transmettre l’anxiété, la peur, la douleur de la mémoire, la souffrance, et qui permettrait d’empêcher par étouffement toute maladresse blessante du langage de mes contemporains.

Là, tout de suite, tout ce qui m’empêche de m’ouvrir les veines dans une baignoire pleine d’eau froide sous l’emprise de l’alcool, c’est de savoir que ma maman et Mag seraient probablement peinées d’apprendre ma fin.

Je veux disparaître.

Et le pire, c’est que je sais que si je communiquais ce malaise, j’aurais le droit immédiat à une oreille attentive, mais aucune compassion, aucun partage fondamental de mon ressenti.

Fuck, fuck, fuck.

À défaut de suicide efficace, je vais autister dans mon lit et dans le noir pour le reste du week-end. Bye.