Retour

Je suis rentré.

Reposé, c’est étonnant.

En fait, pas si étonnant que ça. Je me suis retrouvé dans un coin isolé, avec des gens très très très différents de mon quotidien, mais avec qui je me sens pourtant très bien pour cause d’affinités de longue date.

J’ai eu l’agréable surprise de découvrir plein de choses.

  • M’ayant frappée dès le départ, la simplicité rafraîchissante de EasyJet… Equilibrée, malheureusement, par un système d’information assez absent (mon vol de retour n’était même pas mentionné dans les listings de l’aéroport de Liverpool, les voyageurs ont été parkés une demi-heure dans deux bus sous la pluie sans chauffeur ni explications). D’un naturel désormais plutôt patient, les divers retards et attentes ne m’ont pas dérangé, et j’ai trouvé pertinente la réduction à son strict minimum (le seul que je trouve justifiable) des procédures d’enregistrement et les formalités administratives.
  • L’humidité incertaine du Pays de Galles. Avec un souvenir de crachin gris de mon dernier voyage à Londres, j’étais surpris avant mon départ de voir du beau temps à la météo du coin. Effectivement, le soleil m’a accueilli, avec un ciel clair, une température clémente et un peu de vent, exactement ce qu’il me fallait pour me mettre de bonne humeur. Mais la pluie est venue aussi, puis repartie, puis revenue. Le temps était changeant, et même si j’aime la pluie ça m’a irrité. Je n’osais pas sortir pour aller me promener.
  • Les bienfaits cachés du jeu vidéo sur le moral et les nerfs. Bien que je ne le conseillerais pas à quelqu’un qui souhaite “rentabiliser” son voyage cher dans un pays étranger, c’est pourtant une manière d’obtenir en seulement trois jours les effets reposants (pour l’esprit) de deux semaines de vacances dans un endroit tranquille. Et puis Sacred, c’est beau, et nettement plus intéressant que Diablo.
  • Mes talents d’éducateur pour enfant(e)s en bas âge. Je ne pensais pas pouvoir autant captiver le regard de deux petites filles et enseigner en moins d’une heure un vocabulaire de 25 mots français à une anglophone. Bon, j’exagère peut-être, mais comme ça j’aurai confiance en moi quand j’irai candidater à un poste d’assistant d’éducation.
  • La richesse nutritionnelle des tartines de tomate et de fromage anglais grillées au four. C’est gras, c’est bon, et deux tartines font l’effet d’un repas entier.
  • Le magazine “Attitude”, acheté en partant de Liverpool pour éviter l’ennui pendant le trajet et pour déterminer en quoi consiste la presse pédégouine locale. Déjà, c’est rigolo, les boutiques de presse anglaises. La section “tabloïds” me fait l’effet des sites web de 1995, subtils mélanges de patchwork, de salade de fruits et de collage, tant les couleurs, les polices de caractères et les dispositions éditoriales sont variées et… déstructurées. C’en est presque caricatural selon mes standards (quoique normal selon les standards locaux)… Quant à Attitude, c’est fidèle à son titre : il s’agit d’attitude (queer, homo ou hétéro) dans la société anglaise, ça seulement, mais c’est déjà pas mal. On trouve dans ce numéro un fascicule entièrement dédié à la mode, rempli d’interviews d’icônes de la mode qui expliquent qu’est ce que la mode pour elles (et non le défilé de photos auquel je m’attendais). On trouve dans le corps du magazine des interviews, des articles, des coupures de presse, des photos, où les uns et les autres expliquent quelle images il se donnent et celle qu’ils voudraient donner, et les conseils aux lecteurs portent, bien sûr, sur… leur image. C’est assez superficiel, mais sans être vulgaire : ce magazine parle d’attitude, et le fait bien.
  • La ressemblance entre le peu que j’ai vu du Pays de Galles avec les souvenirs que je garde de Camberra, la capitale australienne. Une faible densité de population, même dans le centre ville de Wrexham, des rues larges, des bâtiments qui sans être récents proviennent d’une même époque en masquant toute forme d’architecture plus ancienne.
  • Un livre, “The Rules of Work”, par Richard Templar, à mettre entre toutes les mains qui veulent s’intégrer et réussir comme employé dans les entreprises capitalistes mais qui ne savent pas très bien comment (ou veulent s’améliorer à la pratique de cet exercice). Agréable surprise, car l’ouvrage n’est pas évangéliste, et ne prend pas le lecteur à parti : il présente l’expérience de l’auteur, ses constats, ses expériences et ses conclusions sous formes de conseils simples, qui font appel au bon sens plus qu’à la culture d’entreprise. Pour moi, c’est une sélection de quelques principes généraux de bonne conduite en société, accompagné d’une explication de valeur pour l’entreprise, laissée au choix d’adoption du lecteur.

D’autres choses, aussi. Par exemple, je suis parti avec l’intention de provoquer certains sujets de conversation (j’insiste sur le pluriel), pour vérifier si une amitié faite pour résister à l’épreuve du temps résiste aussi à l’épreuve du changement des personnes. Je suis revenu sans avoir provoqué ces sujets, mais sans que ça me manque : ces trois jours m’en ont dispensé, j’ai compris que malgré la distance culturelle, la distance de préoccupations, la tolérance qui n’a pas besoin d’être introduite (nuance, nuance) s’accomode très bien des différences, pour peu que celles-ci ne viennent pas perturber ce qui existe déjà et qui ne les dérange pas.

Et puis une chouette citation d’un truc lu dans un coin de page : we have only one life. Ce petit bout de phrase me donne à chaque fois l’impression qu’il est le passeport pour tous les excès, pour tous les choix déraisonnables, pour toutes les actions procurant des émotions fortes, et en même temps l’anathème des soi-nommés “adultes” quand il s’agit de trouver des critères de distinction des “enfants” ou de leur “immaturité”. Un bout de phrase rempli de paradoxe, de tension dans la vie, que tout le monde comprend sans pour autant l’approuver, qu’on peut utiliser pour consoler ou pour blesser, mais qui reste pour moi l’excuse la plus inattaquable philosophiquement parlant, à part pour les Bouddhistes bien sûr.

Maintenant, j’ai faim. Et assez d’écriture. Je vais aller me faire un petit goûter.